Quand la forêt humide rencontre la barrière de corail
Cairns, Australie, le 28 avril 2008,
De retour en Australie, dans le Queensland cette fois-ci, au nord-est du pays, nous explorons pendant deux semaines la région située au nord de Cairns.
Un peu déçus de ne pas avoir pris le temps de découvrir le coeur rouge de l'Australie, nous nous offrons une toute petite séance de rattrapage dans les Atherton Tableland, une région de hauts plateaux vallonnés et de cascades abondantes, anciennement recouverts de forêt humide et aujourd'hui exploités pour la canne à sucre et l'élevage. C'est d'ailleurs pour cultiver la canne à sucre et dans le cadre d'une politique négrière que des kanaks ont jadis été amenés en Australie ; on retrouve encore une communauté kanak dans le nord Queensland.
Nous avons roulé jusqu'à Chillagoe, ses ruines de fonderie, sa station essence, son bar-saloon digne du far-west et ses termitières rouges. Nous avons goûté à l'Australie profonde, rurale et déserte, avec ses pistes de terre ocre, le long desquelles wallabies et vaches nomades viennent nous dire bonsoir au coucher du soleil.
Après cette incursion dans les terres, nous regagnons la côte, et posons nos valises pour 4 jours à Port Douglas, station balnéaire chic et décontractée située à 60 km au nord de Cairns. La petite ville compte une marina située dans l'estuaire d'une rivière, dans un cadre magnifique de collines recouvertes de forêt humide.
C'est aussi le point de départ d'excursions en bateaux sur la Grande Barrière de Corail, la plus grande au monde, et également la plus longue forme vivante, visible depuis l'espace.
La barrière vue de bateau n'a rien d'extraordinaire, et après avoir goûté à la beauté du lagon calédonien, la couleur de l'eau est un peu décevante. Mais vue d'avion, la barrière prend tout son sens. Surtout le spectacle se trouve sous l'eau. Même si les coraux ont souffert de la surfréquentation touristique, il n'en reste pas moins que le relief sous-marin est spectaculaire (plateaux et vallées) et que la faune présente des spécimen de poissons tropicaux de taille inhabituelle. Déposés par le bateau sur 3 spots différents sur la barrière, nous avons pu observer en "snorkelling" (palmes-masque-tuba) les très belles formations coralliennes et les énormes poissons qui y évoluent. Nous avons même aperçu, à 20 mètres, notre premier requin de récif, heureusement assez petit et peu intéressé par notre présence.
Cette partie de l'Australie est particulièrement inhospitalière, puisqu'en sus des requins, la mer abrite entre novembre et mai deux espèces de méduses mortelles, nous obligeant à nager dans des tenues dignes de Jacques Villeret dans la soupe aux choux. Quant aux estuaires et aux rivières, ils abritent de nombreux crocodiles d'eau salée, les plus agressifs au monde, cachés au coeur de la mangrove. Nous avons pu en observer deux spécimen sur la Daintree River, près de Cape Tribulation où s'est achevé notre périple australien.
Cape Tribulation est un bout du monde. Après ce point, un 4x4 est nécessaire pour continuer et gagner le Cape York. Il n'y a ni réseau GSM ni électricité.
Cape Tribulation doit son nom à notre ami le capitaine James Cook. Il l'a ainsi nommé car c'est à partir du moment où il s'est échoué sur le récif au large de ce cap que les péripéties malheureuses ont commencé pour l'équipage de l'Endeavour.
Mais si la région de Cape Tribulation est remarquable, c'est aussi parce qu'elle est le seul endroit au monde où la forêt humide rejoint la mer (poussant même sur le sable), et qu'elle compte deux sites naturels classés au patrimoine mondial de l'Unesco, la forêt humide et la Grande Barrière de Corail.
Au large du Cape Kimberley se trouve une petite île corallienne : Snapper Island. Nous y avons passé 2 jours merveilleux, jouant les Robinson Crusoé. Partis en kayak de mer depuis Cow Bay, au sud de Cape Tribulation, nous avons longé la côte, passé le Cap Kimberley, et rejoint par la pleine mer les rivages de cette île déserte.
Là, échoués sur une petite plage, nous avons installé notre campement un peu en retrait dans la forêt humide. Nous avons profité de moments magiques : snorkelling sur le récif à deux mètres de la plage, découverte de l'île en kayak ou à pied, baignade, apéritif face au soleil couchant et dîner à la lumière des bougies, à discuter avec notre guide, Clare l'anglaise et Kerin l'Australienne. Et quel bonheur de se réveiller le matin au moment où le disque rougeoyant du soleil commence à apparaître sur la mer, et de le voir se lever tout doucement, allongés dans un hamac, sirotant un café bien chaud...